Accouchement à domicile : une lutte pour la vie
À l’heure où les maternités ferment une à une dans les campagnes, des groupements de sages-femmes se battent au quotidien pour conserver le droit à exercer leur profession d’accoucheuses à domicile et à aider les parents dans cette démarche. Un vrai combat au quotidien, où rien ne les protège…
La mort programmée des campagnes
Depuis quelques années, les hôpitaux ont vu leurs services démantelés, supprimés au rythme des restructurations successives imposées par l’Agence Régionale de Santé (ARS). En effet, en vertu du décret du 9 octobre 1998, les hôpitaux qui réalisent moins d’un certain seuil d’interventions par an sont menacés de fermeture. Première cible évidente : les petits hôpitaux de province. Dans le cas des maternités, ce seuil est de 300 par an. En dessous, la maternité est fermée.
En 2008 des voix se sont élevées, dont celles de plusieurs maires, dans la petite ville de Clamecy (Nièvre) contre la fermeture de la maternité. Pour toutes les communes alentour, cette annonce a sonné le glas définitif d’un territoire déjà à l’agonie. D’autant que quelque temps plus tard, en 2012, le même sort était réservé à l’hôpital d’Avallon. Ainsi, pour accoucher, les mères n’ont d’autre choix que de se rendre dans les maternités des villes les plus proches, Nevers ou Auxerre, toutes deux inaccessibles à moins de trois quarts d’heure de route.
De nombreuses autres maternités de campagne ont été fermées pour cette raison. Bien des communes déjà isolées se retrouvent sans solution, ce qui les expose aux pires drames comme en témoignent régulièrement les unes des journaux. En réponse à ce « désert » médical, des collectifs de parents et de sages-femmes se sont rassemblés un peu partout en France pour mettre en place la possibilité de naissances à domicile. Hors grossesses à risques, bien entendu, la charte des sages-femmes étant très stricte sur ce point.
Pour ces professionnelles de la naissance, l’enjeu est conséquent : continuer d’accompagner les femmes pour mettre au monde leurs enfants dans de bonnes conditions, y compris chez elles. Dans ces endroits reculés, elles sont les seules encore en mesure de prendre en charge les naissances, et pourtant les autorités de santé semblent ne leur donner aucun véritable moyen d’exercer leur profession. Surtout, le prix à payer pour accomplir leur précieuse mission est si lourd qu’elles n’ont d’autre choix que d’arrêter ou de devenir hors-la-loi !
L’illégalité ou la ruine
Au delà du problème causé par les fermetures de maternités, les femmes ne désirent pas toujours donner naissance dans un hôpital. Les témoignages d’accouchements mal vécus en milieu hospitalier sont en effet de plus en plus nombreux et les parents ne se sentent parfois pas respectés dans leurs choix. Qui plus est, le débat à l’Assemblée nationale sur le plan de financement de la sécurité sociale qui prévoyait l’expérimentation des « maisons de naissance » ayant été avorté, la diversité de solutions pour accoucher se trouve réduite à peau de chagrin.
Dès lors, l’accouchement à domicile apparaît pour certains comme une évidence. Mais ce n’en est pas une pour tout le monde. Comme l’explique le collectif Naître chez Soi [1], lorsqu’un transfert en maternité est nécessaire au cours d’un accouchement à domicile, les conditions de prise en charge peuvent être très perturbantes pour les parents : « La mère peut se retrouver infantilisée, ses choix dénigrés, cette maltraitance morale pouvant aller très loin ». Et le plus souvent, la sage-femme en charge du couple n’est pas autorisée à rester. Tous ces rouages censés fonctionner ensemble ne réussissent pas à s’accorder et ne facilitent pas l’insertion de pratiques telles que l’accouchement à domicile.
Mais le plus désastreux est que ces professionnelles de la naissance sont aujourd’hui pieds et poings liés par les obligations attachées à l’exercice de leur métier.
Depuis 2001, les sages-femmes accompagnant des parents dans leur projet d’un accouchement à domicile ont d’immenses difficultés pour accéder à une assurance responsabilité civile professionnelle couvrant l’ensemble de leurs activités. Pourquoi cela ? Parce ce que ces assurances obligatoires sont inabordables.
Malgré de nombreuses discussions et pétitions, les tarifs proposés par l’intermédiaire du Bureau Central de Tarification (B.C.T.) restent totalement disproportionnés par rapport aux revenus des sages-femmes : 20 000 € par an d’assurance, pour un chiffre d’affaires annuel souvent inférieur à cette somme. Cherchez l’erreur.
L’argument pour justifier ce prix exorbitant ? L’estimation d’un risque plus important de problèmes lors d’un d’accouchement à domicile. Argument non soutenu par des pays comme les Pays-Bas ou l’Angleterre dont les statistiques prouvent le contraire.
Il est impossible pour la majorité des sages-femmes en exercice de s’acquitter d’une telle somme, c’est pourquoi rares sont celles qui bénéficient d’une assurance. Toutes les autres pratiquent sans assurance au risque d’être radiées !
En effet, l’État et l’Ordre des sages-femmes ont récemment informé ces dernières que la non souscription d’une assurance adaptée à leur exercice les exposait non seulement à une radiation de l’ordre, mais aussi à des sanctions pénales. Et la note s’avère salée : une amende de 45 000 euros et une interdiction d’exercer.
Quelle alternative reste-t-il à ces sages-femmes pour ne pas être hors la loi ? Pratiquer des dépassements d’honoraires allant de 1.000 à 2.000 EUR au risque de fermer aux mères les plus modestes la possibilité d’un accouchement à domicile ? Arrêter et priver de ce choix des centaines de familles isolées partout en France ? Cela est impensable. C’est l’impasse ! Les femmes qui veulent rester chez elles accoucheront seules…
Les parents et les sages-femmes qui militent en faveur de l’accouchement à domicile ne sont donc pas de doux illuminés désireux d’un retour aux sources, ils lancent un réel cri d’alarme. Surtout, ils luttent au quotidien pour maintenir la vie dans ces campagnes qui meurent à petit feu. La naissance à domicile pourrait alors offrir une véritable alternative si les institutions de santé parvenaient à sécuriser la profession, tout en ne l’étouffant pas sous le poids d’obligations surréalistes.
Des associations :
- Mettre Ô monde
- Collectif Naître chez soi
- C.D.A.A.D. Collectif de la Défense de l’Accouchement à Domicile
- Pour les soutenir, signez la pétition
Naturellement vôtre,
Augustin de Livois
PS : L’IPSN sera partenaire des Académies de Naturopathies qui auront lieu à Aix-les-Bains les 13, 14 et 15 mars 2015. Vous pouvez déjà consulter le programme et vous inscrire sur le site Internet dédié que vous trouverez ici
Source :
[1]Naître chez soi
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